Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/72

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que mon Maistre m’avoit donnée, d’aller porter ce qu’il avoit escrit à la Princesse de Capadoce. Je fis une telle diligence, que l’arrivay icy quatre heures plustost que celuy que Philidaspe envoyoit au Roy, pour l’advertir de ce qui s’estoit passe, & pour prendre de nouveaux ordres : Mais comme je ne voulois voir que Mandane, je fis le tour de la Ville par dehors : & je fus mettre pied à terre à la porte qui est la plus proche du Chasteau, & qui comme vous sçavez n’en est qu’à vingt pas. Apres avoir dit à ceux qui m’arresterent à cette porte, que je venois de Themiscire, ils me different passer : de sorte que j’entray mesme dans le Chasteau sans estre connu, parce qu’il estoit presque nuit : & ainsi montant par un Escallier dérobé, qui respondoit à l’Apartement de la Princesse, j’entray dans son Antichambre, sans que personne m’eust veû. Je luy fis pourtant dire auparavant par Martesie que je demanday la premiere, que Feraulas avoit quelque choie a luy dire en particulier : l’ay sçeu depuis par cette Fille, que la Princesse avoit esté extrémement triste tout ce jour-là ; & qu’elle tut fort esmuë, quand on luy dit que je voulois parler à elle, sans que personne entendist ce que je luy voulois dire. Que me peut vouloir Feraulas : dit-elle à Martesie ; car si Artamene est vainqueur, c’est au Roy à qui il doit rendre compte de sa victoire : & s’il est vaincu, adjousta-t’elle en soupirant, je ne sçauray que trop tost son infortune. Madame, luy respondit cette Fille, je ne puis vous dire rien de ce que vous voulez sçavoir : car je n’ay pas plustost veû Feraulas, que sans luy donner presque le loisir de me dire qu’il vouloit parler à vous, je suis venue vous en advertir. Qu’il entre