Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/244

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hier au ſoir : & aidez moy, je vous en conjure, à deſcouvrir qui eſt l’heureux Amant qui a pourtant eu le malheur de perdre une choſe ſi precieuſe : & aprenez moy en ſuitte, le nom de cette belle Perſonne ſi vous le sçavez. Theanor rougit, à la veuë de ce Portrait : & apres l’avoir pris, il fut auſſi long temps à le regarder ſans me reſpondre, que s’il n’euſt pas connu de qui il eſtoit. Mais enfin l’ayant preſſé de parler ; pour le nom de cette belle Perſonne, me dit il, ſi vous n’eſtiez Eſtranger à Samos, vous ne l’ignoreriez pas : car la belle Alcidamie l’a rendu trop celebre, pour faire qu’il ne ſoit pas connu de tout ce qu’il y a de gens raiſonnables dans noſtre Iſle. Mais pour celuy de cét heureux Amant que vous dittes qui l’a perdu ; je ne le sçay point : & peut-eſtre, adjouſta t’il, eſt-ce une Peinture qu’elle a donnée à quelqu’une de ſes Amies. Mais, luy dis-je, c’eſt un homme qui l’a laiſſée tomber, & non pas une Dame : cela peut eſtre encore, me repliqua t’il, ſans que pour cela ce ſoit une galanterie d’Alcidamie, car elle a des Parens qui pourroient avoir ſon Portrait ſans choquer la bien-ſeance : & ſi vous m’en croyez, dit il, vous ne montrerez cette Peinture à perſonne, de peur de vous faire une ennemie d’une auſſi belle Pille que celle là. Ce n’eſt pas mon deſſein, luy dis-je, de la deſobliger : mais j’aurois du moins bien envie de sçavoir à qui eſt veritablement ce Portrait. Je m’en informeray, me dit il, & je vous en rendray compte : mais cependant, encore une fois, n’en parlez pas ſi vous m’en croyez : & ſi vous vouliez meſme, dit il encore, me laiſſer ce Portrait, je penſe qu’il ſeroit mieux en mes mains qu’aux voſtres : car je vous voy une curioſité inquiete (adjouſta t’il en ſous-