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Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/264

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a donné ce Portrait, & meſme vous le faire rendre. A peine eut il achevé de parler, & eut il fait cette action, que ſans luy reſpondre je mis auſſi l’Eſpée à la main, & que nous commençaſmes de nous battre : comme il eſt tres adroit, & que je fus fort heureux, nous fuſmes quelque temps ſans nous rien faire : mais paſſant tout d’un coup ſur luy, apres luy avoir fait une legere égratignure au bras gauche, nous diſputasmes la victoire opiniaſtrément. Et lors que nous euſmes eſté chacun à noſtre tour, tantoſt deſſus tantoſt deſſous : à la fin comme j’eſtois preſt d’avoir l’avantage tout entier, & que je taſchois de racourcir mon Eſpée pour faire avoüer ma victoire à Timeſias ; Policrate qui venoit ſe promener en ce meſme lieu arriva., ſuivi de beaucoup de monde, & de Theanor meſme : qui ne sçachant du bout de l’Allée qui c’eſtoit, fut le premier de tous à nous venir ſeparer. Dans la fureur où j’eſtois, de voir que l’on m’arrachoit d’entre les mains mon ancien ennemy & mon nouveau Rival, j’en voulus quereller Theanor : mais Polycrate arrivant un moment apres, il fallut changer de diſcours : & luy demander pardon de ce que contre ſes ordres nous nous eſtions encore querellez Timeſias & moy. Comme il m’aimoit alors plus que mon ennemy ; que j’eſtois Eſtranger ; & que l’autre eſtoit ſon Subjet ; ce fut à luy que s’adreſſerent ſes reprochez : mais Timeſias qui vouloit ſe juſtifier, & arriver à ſa fin, luy dit, Seigneur, ſi vous sçaviez la cauſe de noſtre querelle, vous m’excuſeriez ſans doute : & vous avoüeriez que je n’ay fait que ce que j’ay deu faire. J’ay peine à croire, repliqua Polycrate, que vous ayez raiſon de quereller Leontidas : & c’eſt pour cela, pourſuivit il, que je veux aprendre