Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/267

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eu tort de ne dire point un menſonge à Timeſias : & trouvant auſſi que Timeſias avoit ea ſujet de croire que je ne parlois pas ſincerement : il nous commanda de nous embraſſer. Mais auparavant Timeſias ſupplia Polycrate de vouloir que je rendiſſe à Alcidamie le Portrait que j’avois trouvé : Vous me ferez croire, dis-je alors en riant à Timeſias, que c’eſt peut-eſtre vous meſme qui avez perdu ce Portrait en vous promenant : & que vous repentant d’un larcin qui ne noirciroit pourtant pas voſtre reputation quand vous l’auriez fait, vous voulez qu’il ſoit reſtitué. Timeſias rougit de colere à ce diſcours ſans y reſpondre : & ce qu’il y eut d’admirable fut que quelques perſonnes creurent que la choſe eſtoit ainſi, & le publierent : & à mon advis Theanor y contribua tout ce qu’il pût. Pour moy qui fus ravy de voir que Polycrate rioit de ce que le diſois, je luy dis en luy adreſſant la parole, que ce ſeroit une eſtrange choſe, ſi n’ayant rien pris à perſonne, on m’obligeoit à rendre ce que la Fortune toute ſeule m’avoit donné. En que n’ayant point fait de crime, je ne devois pas eſtre puni : ny eſtre traité de la meſme ſorte que le pourroit eſtre le veritable voleur du Portrait. s’il eſtoit connu. Timeſias voulut encore dire quelque choſe : mais Polycrate prenant la parole, & voulant tourner toute cette querelle en galanterie, me dit que pour toute punition de m’eſtre battu, il vouloit que du moins je monſtrasse cette Peinture. Seigneur, luy dis-je, il eſt ſi glorieux à Alcidamie qu’elle ſoit veuë, que je n’en feray pas de difficulté : pourveû que vous me faſſiez l’honneur de m’aſſurer de me la rendre : & comme il me l’eut promis je la luy monſtray. mais à peine l’eut il veuë, que regardant la Boiſte,