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Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/307

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n’entendent. Cependant la connoiſſance de ces erreurs, ne guerit pas l’eſprit de ceux qui en ſont capables : & la jalouſie enfin a quelque choſe qui tient bien plus du Sortilege, de l’Enchantement, & de la Magie, que d’une ſimple paſſion. Prononcez donc en ma faveur, ô mon equitable Juge : & ne refuſez pas voſtre pitié au plus malheureux Amant du monde.

Leontidas ayant ceſſé de parler, Marteſie voulut encore ſuplier Cyrus, de prononcer l’Arreſt de ces quatre illuſtres Amants : mais s’en eſtant deffendu, avec une civilité tres obligeante ; & luy ayant meſme refuſé de la conſeiller : elle fut contrainte d’agir par ſes propres ſentimens. Apres donc qu’elle eut un peu reſvé, comme pour repaſſer dans ſon eſprit ce qu’elle venoit d’entendre : elle parla avec beaucoup de grace en ces termes, quoy que ce ne fuſt pas ſans rougir.


JUGEMENT DE MARTESIE.

Je sçay bien que la curioſité de sçavoir les avantures de quatre illuſtres Perſonnes, m’a fait accepter la qualité de leur Juge avec injuſtice : mais je sçay bien auſſi, que vous m’avez tous ſi admirablement bien dit vos raiſons, & ſi parfaitement bien dépeint vos ſouffrances ; qu’il n’eſt preſque pas poſſible, que je m’abuſe dans mon opinion.

Je déclare donc hardiment, que Thimocrate tout abſent qu’il eſt, puis qu’il eſt aimé, eſt le moins malheureux des