Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/322

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de faire venir des Architectes de Grece, pour reparer les deſordres de l’embraſement de Sinope : voulant de plus, que comme il y avoit une Statuë de ce fameux Mileſien qui l’avoit fondée, qui ſe nommoit Autolicus, il y en euſt auſſi une de Cyrus, comme en eſtant le ſecond fondateur, ce qui fut executé. Cependant cét illuſtre Prince fut dire adieu à Marteſie, qui ne le vit pas partir ſans douleur : elle voulut alors l’obliger à luy rendre la Peinture de Mandane, qu’elle luy avoit preſtée, à condition de la remettre en ſes mains quand il partiroit pour la guerre d’Armenie : mais ce Prince la regardant attentivement ; cruelle Perſonne, luy dit il, comment voudriez vous que je puſſe vaincre, ſi vous m’oſtiez ce qui me doit rendre invincible ? Vous avez tant remporté de Victoires ſans ce ſecours, repliqua t’elle, qu’il n’y a pas d’apparence que vous en ayez beſoin. Cyrus entendant parler Marteſie de cette ſorte, creut qu’effectivement elle vouloit qu’il luy rendiſt ce Portrait : ce qui luy donna une douleur ſi ſensible, que le viſage luy changea : & ſes yeux en devindrent ſi melancoliques, que Marteſie en ayant compaſſion, luy dit, Seigneur, je change le terme que je vous avois donné : & je ne veux vous obliger à me rendre la Peinture de la Princeſſe, que quand vous l’aurez delivrée. Cyrus la remercia alors avec une joye extréme : & apres luy avoir demandé s’il ne pouvoit rien pour ſon ſervice ? Elle luy dit qu’ayant deſſein de s’approcher un peu plus prés de Mandane, afin de la revoir pluſtost quand il l’auroit remiſe en liberté ; elle avoit intention d’aller avec une de ſes parentes qui devoit partir dans trois jours, pour s’en retourner vers les frontiers d’Armenie où elle demeuroit : &