Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/329

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là n’avoit pas grand nombre de Villes, petites ny mediocres, à cauſe de l’abondance des paſturages, qui font que toute la Campagne eſt fort habitée : celle là eſtoit ſi prodigieuſement peuplée, que quand ſes habitans ne feroient ſimplement que ſe monſtrer rangez en Bataille, ils feroient peur à regarder. Qu’ainſi il le ſupplioit de ne trouver pas mauvais, s’il luy diſoit que ſelon ſon ſens, il ne devoit rien entreprendre, que toute l’Armée ne fuſt venuë : & qu’il ſe devoit contenter de ſe ſaisir du paſſage de la riviere, qui eſtoit aſſez foiblement gardé. Parce que quelques advis que reçeuſt le Roy d’Armenie de la marche de l’Armée de Ciaxare, il ne croyoit pourtant pas encore qu’on luy allaſt faire la guerre tout de bon : & s’imaginoit touſjours, que ce n’eſtoit ſeulement que pour l’obliger par la crainte, à payer le Tribut qu’il devoit. Cyrus remercia alors Araſpe, de toute la peine qu’il avoit euë, & du danger où il s’eſtoit mis à ſa conſideration : & luy faiſant quitter ſon habillement de Marchand, & prendre un autre cheval que le ſien, il pourſuivit ſa marche, apres avoir tenu Conſeil de guerre, ſur l’attaque du paſſage de la Riviere, pour faire ſeulement honneur aux Chefs qui eſtoient aveque luy : car dans tous les Conſeils qui ſe tenoient, ſes advis en faiſoient touſjours toutes les reſolutions. Il dépeſcha auſſi vers Ciaxare, pour l’advertir de tout ce qu’Araſpe avoit apris : & l’envie de vaincre ſe renouvellant dans ſon cœur, il fit haſter la marche de ſes Troupes : & ſe prepara à forcer à l’heure meſme le paſſage de la Riviere, n’oubliant rien de tout ce qu’un Capitaine prudent & courageux peut faire, en une pareille rencontre. Auſſi vint il aiſément à bout de ſon deſſein : &