Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/344

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de vous : mais je n’ay point sçeu que cette Fortune qui l’a renverſé du Throſne, luy ait rien fait gagner depuis, J’ay sçeû meſme en ſuite qu’il n’eſtoit point où vous eſtiez : & l’on m’a dit enfin (ſans m’en pouvoir pourtant donner nulle certitude) qu’il eſtoit en Armenie, où je ſuis venuë le chercher, & où je ne l’ay pas trouvé. Quoy Ma dame, luy dit Cyrus, le Roy de Pont & la Princeſſe Mandane ne ſont point icy ! Je ne croy pas, reſpondit elle, que le Roy mon Frere y ſoit : & je ne comprens point du tout comment quand il y ſeroit, la Princeſſe Mandane y pourroit eſtre. Cy rus voyant avec quelle ingenuité cette Princeſſe luy parloit, luy conta alors comment le Roy de Pont avoit ſauvé la Princeſſe Mandane d’un naufrage, & comment il avoit quitté ſon Navire, & s’eſtoit mis dans un Bateau pour remonter la Riviere d’Halis, & pour venir en Armenie : de ſorte, pourſuivit il, Madame, que je ne voy pas comment il eſt poſſible qu’il n’y ſoit pas, & comment vous ne le sçavez point. J’ay eu ſe peu de liberté, dit elle, depuis que je ſuis en Armenie, qu’il ne ſeroit pas impoſſible qu’il y fuſt, quoy que je ne le sçeuſſe pas : Mais Seigneur, comment peut il eſtre vray, que luy qui m’a parlé de vous, comme de l’homme du monde pour qui il avoit le plus d’eſtime & le plus d’amitié (quoy qu’il ne sçeuſt pas voſtre condition) puiſſe vous avoir deſobligé ? luy, dis-je, que vous avez tant obligé ; luy qui vous doit la vie & la liberté ; luy qui auſſi a eu intention de vous conſerver, dans un temps où vous luy arrachiez la victoire d’entre les mains. Il n’a pas eu intention de me nuire, repli qua Cyrus, mais il m’a pourtant cruellement outragé : ha Seigneur, dit elle, il ne m’a pas dé