Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/37

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parole, de faire deux choſes qu’il luy diroit, il le mettroit en liberté. Ce Prince n’ayant voulu luy rien promettre, qu’il ne sçeuſt auparavant ce qu’il deſiroit de luy : il fut enfin contraint de luy dire, que ce qu’il ſouhaittoit en cette rencontre eſtoit qu’il luy donnaſt le Gouvernement de Pterie pour ſa ſeureté, & qu’il ſe deffiſt de Ciaxare : s’offrant de luy en donner les moyens, & d’executer meſme la choſe. Car Seigneur, luy dit ce méchant homme, c’eſt le ſeul chemin qui vous reſte d’éviter la mort, & de vous rendre Maiſtre de toute l’Aſie. Une propoſition ſi criminelle, donna tant d’horreur à Cyrus, qu’il chaſſa Metrobate de ſa chambre avec injure : & par bonheur un des Soldats qui gardoient cét illuſtre Priſonnier, & qui ſe trouva genereux, entendit toute cette converſation. Ce traiſtre voyant donc qu’il ne sçavoit que faire, ne ſongea plus qu’à perir, & qu’à faire perir avecque luy, tout ce qui eſtoit dans le Chaſteau : Neantmoins comme il s’imaginoit touſjours, que peut-eſtre pourroit il arriver quelque choſe, où la perſonne de Cyrus luy pourroit ſervir, il ne ſe haſtoit pas de le faire tuer comme il le pouvoit. Cependant le bruit ſe redouble : c’eſt en vain que les Rois & les Princes veulent retenir les Soldats : car comme la plus grande partie d’entre eux n’eſtoient pas nais Sujets de Ciaxare ; qu’ils eſtoient de Peuples nouvellement aſſujettis ; & qu’ils eſtoient animez par les trente mille Perſans, qui vouloient delivrer leur Prince ; ils n’avoient pas dans le cœur ce profond reſpect qui doit eſtre ineffaçable de l’ame des Sujets, quels que puiſſent eſtre leurs Rois : De ſorte que tout eſtoit preſt d’aller à l’extréme violence. Ils apportoient deſja des échelles : & je penſe qu’ils euſſent meſme aporté