Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/424

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ne puis vous accorder ce que vous me demandez, repliqua t’elle ; mais Heſionide vous verra encore une fois en quelque lieu. Ce me ſera touſjours une grande grace, reſpondit il, neantmoins Madame, la paſſion que j’ay pour vous, ne s’en contentera pas : & il importe tellement au bonheur de toute ma vie, que je vous entretienne avec quel que loiſir ; que je vous declare, Madame, que je ne ſortiray point d’Heraclée, que vous n’avez accordé à ma reſpectueuse paſſion, la grace que je vous demande. Je ne vous la de man de pas, Madame, par mon propre merite : je vous la demande au Nom du Prince Sinneſis, qui vous a tant de fois parlé en ma faveur. Cet te conjuration eſt bien preſſante, reprit elle, mais tout ce que je puis eſt de vous promettre que je feray tout ce que je pourray pour me reſoudre à vous voir encore une fois. Je ſeray tous les jours à pareille heure dans cette Allée, reprit il, où je pourray recevoir vos ordres ſeurement : parce que le Jardinier du Palais eſt abſolument à moy, comme ayant long temps ſervi chez le Prince mon Pere : & ç’a eſté luy qui m’eſt venu advertir que vous eſtiez icy. Je ne conſens pas que vous vous expoſiez tous les jours à eſtre veû, reſpondit elle, mais dites ſeulement à Heſionide où vous logez, & elle ſe chargera du ſoing de vous advertir de ma volonté.

Apres cela la Princeſſe le quitta : & Spitridate m’ayant dit où il logeoit, il ſe trouva que c’eſtoit chez une perſonne de ma connoiſſance, & en qui je me pouvois fier de toutes choſes. Comme la Princeſſe fut retournée à ſon Apartement, elle parut plus reſveuse & plus melancolique qu’auparavant que d’avoir veû Spitridate : en effet quand elle ſongeoit que ce Prince