Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/432

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rien obtenir de la meilleure Princeſſe du monde pour tous ceux qui ne l’adorent point : & de la plus rigoureuſe, pour l’homme de toute la Terre qui la revere le plus. Mais, Spitridate, de qui vous pleignez vous ? interrompit elle : de vous, Madame, repliqua t’il, qui voulez me perſuader que vous ne me haïſſez point, & qui me refuſez pourtant toute ſorte de ſecours. Car enfin ſi vous m’aimiez, vous diriez abſolument que vous n’eſpouserez jamais Pharnace : & que ſi les Dieux le permettent……… Comme Spitridate alloit continuer ſon diſcours, Artane vint advertir la Princeſſe que le Roy alloit arriver. Par bonne fortune j’en tendis ſa voix à travers de la Paliſſade : de ſorte que nous fiſmes retirer ce Prince en diligence. Cela ne pût touteſfois eſtre ſi promptement fait, qu’Artane n’entre-viſt quelqu’un lors qu’il entra dans l’Allée : mais apres avoir donné cét advis à la Princeſſe, elle luy donna la main, afin qu’il ne demeuraſt pas dans ce Jardin.

A peine fuſmes nous à ſon Apartement, que le Roy arriva : ainſi Artane ayant un pretexte de la quitter, le fit en diligence : & au lieu d’aller ſalüer ce Prince, il retourna dans le Jardin, pour voir s’il ne pourroit tirer nulle connoiſſance de ce qu’il avoit veû. Par malheur, Spitridate n’en avoit encore pû ſortir, parce qu’il avoit trouvé la porte la plus proche de ſon logis fermée : Artane l’apercevant donc le ſuivit, & voyant que c’eſtoit un homme qui ne vouloir pas eſtre veû, il creut bien que c’eſtoit celuy qui avoit parlé à la Princeſſe. Il s’imagina meſme, que peut-eſtre c’eſtoit Pharnace : mais Spitridate ayant eſté contraint de quitter les Allées couvertes, & de traverſer un Parterre ; quoy qu’il fuſt déguiſé, neantmoins au clair de la Lune, il le reconnut à la taille & au marcher : ou du moins il ſoubçonna que ce pouvoit eſtre