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Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/469

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que la Reine Arbiane prenoit pour vous) & je ne comprens pas, Madame, luy dit il, pourquoy vous ne me voulez pas connoiſtre. La Princeſſe Ariſtée ayant pris elle meſme un flambeau, & luy ſemblant enfin qu’elle voyoit quelque choſe dans les yeux de celuy qu’elle regardoit qui eſtoit veritablement de Spitridate. Madame, dit elle à la Reine, il n’en faut point douter : celuy que vous voyez eſt le Prince mon Frere, & n’eſt point du tout Artamene. Spitridate à qui il eſtoit arrivé plus d’une fois d’eſtre pris pour un autre, en divers endroits de ſes voyages, en fut un peu moins ſurpris que ſi cela ne luy fuſt pas deſja advenu : c’eſt pourquoy prenant la parole, & diſant pluſieurs choſes à ces Princeſſes que nul autre que luy ne leur euſt pû dire : elles acheverent de le connoiſtre, & elles luy donnerent toutes les marques de tendreſſes que l’on peut donner, en revoyant une perſonne infiniment chere, & qu’elles avoient preſque creû ne devoir jamais revoir. Comme la Reine ſa Mere l’avoit touſjours beaucoup aymé, elle avoit fait toutes choſes poſſibles pour appaiſer l’eſprit irrité d’Arſamone, mais elle n’en avoit pourtant pû venir à bout : neantmoins ne voulant pas affliger ce Prince dés leur premiere entre-veuë, elle ne luy parla de rien en particulier : & apres une converſation de deux heures, elle luy dit ſeulement, que pour rendre plus de reſpect au Roy, il ne faloit pas que l’on sçeuſt dans Heraclée qu’il eſtoit revenu, juſques à ce qu’elle euſt parlé a luy. En ſuite de quoy eſtant retournée à ſon Apartement, apres qu’ils eurent donné quelques larmes au ſouvenir du Prince Euriclide, il demeura avec la Princeſſe Ariſtée, qu’il n’avoit point veuë depuis la perte