Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/475

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

fut bien confirmé dans la croyance qu’il avoit eſté trompé : il raconta, avec un peu plus de tranquilité qu’auparavant, le deſespoir qu’il avoit eu : & comment il avoit pris la reſolution, d’aller en effet mourir ſi loing de la Princeſſe Araminte ; qu’elle ne peuſt pas meſme sçavoir des nouvelles de ſa mort. Que dans ce funeſte deſſein, il eſtoit allé au Port de mer le plus proche du lieu où il eſtoit, s’embarquer dans le premier Vaiſſeau qui fit voile, ſans demander ſeulement où il alloit. Que par hazard il s’en eſtoit trouvé un de Marchands de Tenedos qui l’avoit reçeu : que de là il avoit eſté à Epheſe, parce que l’on diſoit que Creſus l’alloit attaquer. Qu’en effet il avoit veû toute cette guerre ſans y pouvoir perir, quoy qu’il s’y fuſt aſſez expoſé : que ſe ſouvenant que s’il euſt voulu ſuivre l’ambition d’Arſamone, plus toſt que l’amour de la Princeſſe, il auroit eſté Roy ; & qu’ainſi il avoit preferé les chaiſnes d’Araminte à la Couronne de Bithinie : il avoit fait peindre ſur ſon Bouclier, cét eſclave qui briſoit des Couronnes, & qui choiſissoit des fers, dont je vous ay deſja parlé. Qu’en ce lieu là, apres la fin de la guerre, il s’eſtoit embarqué de nouveau pour aller en Chipre : luy ſemblant qu’une Iſle conſacrée à la Mere des Amours, luy ſeroit plus favorable qu’une autre. Mais qu’en ayant trouvé le ſejour trop plaiſant pour un malheureux, il avoit paſſé en Cilicie : qu’en ſuitte ne pouvant demeurer en un lieu, il avoit voulu ſe remettre en mer : mais qu’un Eſtranger qui ſe trouva eſtre un Mage de Perſe, l’eſtant venu aborder, luy avoit rendu tous les honneurs imaginables : luy diſant cent choſes en une langue qu’il n’entendoit pas. Qu’enfin un Truchement Qu’il avoit pris aveques luy