on ne ſongea plus qu’à faire une garde tres exacte, à l’entour de ces Montagnes : & à en reconnoiſtre bien tous les deſtours. Le lendemain Ciaxare voulut voir en Bataille les Troupes du Roy d’Aſſirie, que l’on confondit alors avec toutes les autres, comme eſtant preſentement de meſme Party.
Cependant cette eſpece de Siege ſans Ville, ne fut pas auſſi oiſif, que Cyrus l’avoit penſé : car comme le Prince Phraarte eſtoit brave, & que de plus l’amour le faiſoit agir, il commença de donner quelque occupation : ne l’ayant pû faire durant les premiers jours, parce qu’il avoit eſté malade de douleur, de voir le mauvais ſuccés des affaires du Roy ſon Pere, & la Princeſſe Araminte au pouvoir de ſes Ennemis. Comme il sçavoit admirablement tous les deſtours de ces Montagnes, il faiſoit quelqueſfois pleuvoir en un moment, une greſle de Traits de deſſus leurs plus bas coupeaux : puis diſparoissant en un inſtant, on ne pouvoit meſme imaginer ce qu’il eſtoit devenu. Une autrefois il venoit la nuit juſques au pied des Montagnes, par des chemins tournoyans dans les Rochers, où les ſeuls Armeniens peuvent aller, afin de donner une alarme à tout le Camp : & comme il avoit d’aſſez bons Eſpions dans l’Armée de Ciaxare, il deſcendoit touſjours du coſté que Cyrus n’eſtoit pas : car la valeur de ce Prince eſtoit redoutable aux Armeniens. Mais comme Cyrus n’eſtoit pas accouſtumé d’eſtre ſurpris, & de ne ſurprendre pas les autres : il ſe reſolut d’eſtre pluſieurs nuits à tournoyer par tous les divers Quartiers : afin de pouvoir rencontrer cét Ennemy preſque inviſible, qui ne ſe trouvoit jamais de ſon coſté : & qu’il avoit sçeu eſtre le Prince Phraarte,