Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/545

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pour ſe retirer : Cyrus s’informant de tous ſes Amis, qu’il ne pouvoit bien diſcerner dans l’obſcurité de la nuit ; Aglatidas qui le touchoit, luy dit qu’il avoit entendu nommer Otane pendant ce combat. J’ay encore entendu plus que vous, luy dit Cyrus, car j’ay oüy quelqu’un qui a crié, Otane eſt mort. Comme Aglatidas alloit reſpondre, on vint advertir Cyrus qu’il y avoit quelques ennemis qui ſe ralioient dans un petit Vallon : de ſorte qu’à l’inſtant meſme il y fut, ſuivy de tout ce qu’il avoit de gens : Mais Phraarte (car c’eſtoit veritablement luy dont on vouloit parler) eſtant adverty de la choſe, par un Soldat qu’il avoit fait mettre en ſentinelle ſur l’advenuë de cette petite Vallée : ſe voyant hors de pouvoir de combattre de ſa perſonne : voyant de plus le petit nombre de gens qu’il avoit, & qu’ils eſtoient la plus part bleſſez auſſi bien que luy ; leur commanda de quitter leur armes & de le ſuivre : aimant mieux, dit il, ſe fier en la generoſité de ſon ennemy, qu’en une foible deffenſe qui ne pouvoit plus de rien ſervir. Joint que luy ne pouvant plus combatre : il trouvoit moins de honte à ſe rendre à un Ennemy genereux, que de fuir, ou de ſe laiſſer tuer ſans reſistance. Comme il eut donc eſté obeï par les ſiens, il marcha vers l’endroit d’où il entendoit venir ſes Ennemis : & comme par les rayons de la Lune qui s’eſtoit levée, il faiſoit alors aſſez clair pour pouvoir diſcerner les objets : Cyrus ne fut pas plus toſt en veuë, qu’un des gens de Phraarte qui le connoiſſoit, parce qu’il avoit eſté avec Tigrane à Sinope, du temps que Cyrus eſtoit Artamene, le luy ayant monſtré ; ce Prince s’écria par une genereuſe hardieſſe, dés qu’il creût en pouvoir eſtre