affaire importante m’avoir apellé : & que je ne sçavois pas moy meſme où j’allois, lors que la tempeſte m’avoit pouſſé en cette Côſte. Que cependant je pouvois ſeulement l’aſſurer avec certitude, qu’il trouveroit en moy beaucoup de reconnoiſſance, d’avoir eu la generoſité d’envoyer ſes gens aider aux miens à ſauver mon Vaiſſeau : en effet s’ils ne fuſſent venus nous n’euſſions jamais pû anchrer en ce lieu là, & la tempeſte euſt achevé de nous faire perir. Durant que je parlois à Euphranor, je remarquay que tout ce qu’il y avoit de gens dans cette Galerie s’aprocherent preocupez de la penſée, qu’ils alloient entendre parler un Pirate. Comme il n’y a que quatre langues parmy tous les Ioniens, & qu’elles ſe reſſemblent ſi fort, que quiconque en entend une entend toutes les autres, j’entendois & eſtois entendu ſans peine : y ayant meſme ſi peu de difference de celle de Milet à celle de Gnide, que ce n’eſt preſques que le ſeul accent qui les change, puis qu’en fin l’une & l’autre ſont Greques. Mais Seigneur, parmi toutes ces Perſonnes qui s’aprocherent, je vy quatre ou cinq Dames de bonne mine : entre leſquelles la fille d’Euphranor me parut la plus belle choſe que l’euſſe jamais veuë : & comme elle ſe trouva eſtre la plus curieuſe de la Troupe de voir un Pirate, dont j’ay sçeu qu’elle diſoit n’avoir jamais veu ; elle s’aprocha plus que les autres : & je la ſalüay auſſi avec plus de ſoumission que tout le reſte de la compagnie : qui n’eut qu’une reverence ou deux en general. Mais pour Alcionide (car cette belle Perſonne ſe nomme ainſi) je luy en fis une en particulier, avec le meſme reſpect, que ſi une Divinité m’euſt aparu. Il me ſembla meſme, que pendant que je continuois de parler à Euphranor, elle dit à. une de ſes Compagnes, que je
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