Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/648

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que la principale cauſe de cette guerre, eſtoit la Princeſſe Mandane : de ſorte que s’il l’avoit en ſes mains, il pouvoit aiſément ſe delivrer de ce Tribut, en la rendant au Roy ſon Pere. Que s’il ne l’avoit pas auſſi, il faloit le faire voir ſi clairement, que Ciaxare ny Cyrus n’en peuſſent douter. Ce Prince proteſta alors à Phraarte, qu’il n’avoit eu aucune connoiſſance que le Roy de Pont ny la Princeſſe Mandane fuſſent en Armenie : & qu’aſſurément le ſejour de la Princeſſe Araminte dans ſes Eſtats, avoit donné fondement à l’opinion que l’on avoit euë que la Princeſſe Mandane y eſtoit. Phraarte dit donc au Roy ſon Pere, qu’il faloit qu’il retournaſt dire cette verité à Cyrus, à qui il l’avoit promis : mais tout d’un coup les Soldats s’eſtant mutinez, & demandant à. voir les Magaſins des vivres, auparavant que le Prince Phraarte redeſcendist : il ſe mit un tel deſordre parmy eux, qu’ils abandonnerent leurs Poſtes : & ſi le genereux Cyrus euſt eſté capable de manquer de foy, il avoit une belle occaſion de s’emparer de ces Montagnes, & de tuer tous ceux qui s’en eſtoient fait un Azile. Car on voyoit du bas de la Plaine qu’ils quittoient leurs Poſtes, comme je l’ay deſja dit, & qu’ils alloient par ces Montagnes, diſpersez, ſans ordre ; & meſme quelques uns ſans armes. Mais comme il obſervoit toujours inviolablement ce qu’il promettoit, il regardoit ce deſordre ſans en vouloir profiter, & ſans en sçavoir la veritable cauſe. Mais enfin le Roy d’Armenie forcé par la neceſſité, ſe reſolut de ſe confier en la generoſité de Cyrus, & de ſe remettre entre ſes mains. Il envoya pourtant devant le Prince Phraarte, apres qu’il eut appaiſé les Soldats, en les aſſurant qu’il alloit pour