Les hommes blêmes se remirent à chanter. Mais l’assemblée s’en détourna : à quoi bon louanger un dieu si peu magnifique ? Sur le rivage sans écho se dispersaient pauvrement les sons de leur himéné domptés par d’autres sonorités saintes, majestueuses et fortes : voix du vent dans les branches sifflantes ; voix du récif hurlant au large. Soudain reparurent les serviteurs d’Haamanihi. Ils balançaient un grand fardeau vêtu de feuilles :
— « Pour moi », dit le sacrificateur, « voici mon offrande à Iésu-Kérito. Qu’il me donne, en retour, ma terre Raïatéa. » Il éparpilla les branches : un cadavre parut ; la face était verte et on avait brisé le crâne, à coups de massue. Fier de sa générosité, le prêtre de Oro attendait, dans la bouche des étrangers, des paroles flatteuses.
Mais ils s’agitèrent, sans plus. Noté considérait avec effroi l’homme mort, et ne semblait se soucier de présenter l’offrande. Haamanihi s’impatienta, jeta des ordres, et les porteurs-de-victimes, soulevant à deux le cadavre, le balancèrent un instant, bras tendus, plus haut que les têtes. Le corps tomba sur les tréteaux ; la face branla, pendit en arrière. Haamanihi porta la main pour accomplir les gestes sacrés…
— « Malheureux ! malheureux ! » pleurait le Piritané, balbutiant comme un enfant épouvanté. Ses compagnons, et même les femmes, s’enhardissaient, entouraient le sacrificateur, criaient, le suppliaient de ne point troubler leur prière. Haamanihi, indi-