à percevoir si le récif ouvrait sa ligne, et comment on donnerait dans la passe : il valait mieux ainsi.
Car la tempête n’était pas encore éteinte. Les creux houlant dans la mer-extérieure se reformaient sans relâche ; et la terre, — malgré tous les efforts, — la terre désirée, la terre originelle si ardemment attendue ne s’abordait pas. Le navire dérivait à distance infranchissable des vallées savoureuses, qui, l’une après l’autre, bâillaient et se fermaient. Puis, le vent ressurgit, ayant changé sa route, et soufflant vers un autre coin du ciel. Le ciel rosé s’embruma. La mer bondit encore, plus harcelante : car les vagues nouvelles s’épaulaient contre la houle établie. Dans le soir qui s’avançait, dans les rafales plus opaques, dans la tempête reprenant courage et livrant une autre bataille, les errants, en détresse, virent disparaître cette Île première, où nul vivant ne pourra jamais atterrir.
Puis, la nuit recommença ; si lourde, et si confuse, et si pleine d’angoisses, que Paofaï, ni Térii, ni les douze pagayeurs, ni les cinq femmes survivantes, ne voulurent jamais en raconter. On ne sait pas ce qu’ils virent dans le vent, ou ce qu’ils entendirent monter de l’abîme. L’une des filles, seule, se risqua, malgré sa peur, à divulguer ceci : qu’un feu monstrueux, quelque temps après la fuite de Havaï-i, avait marqué sa place sur la mer, — pendant que d’horribles visages passaient en sifflant dans les ténèbres. On peut croire qu’un atua propice ou plus