naient avec des cris d’allégresse. Et tous, mêlés sans dignité, — manants et chefs, haèré-po d’autrefois, guerriers et femmes, — couraient à la rivière en chantant « Hotana ! Hotana ! »
Le Réformateur, cependant, marchait vers le faré-de-prières. Il passa tout près de Térii qui le dévisagea : rien ne transparaissait en lui de la vertu du rite : ses pas allaient sans noblesse ; ses cheveux broussaillaient encore, seulement un peu collés par l’eau purifiante ; et son nez ne s’était point ennobli. Soudain, d’autres figures, — visions immémoriales peut-être des temps oubliés, — s’imposèrent devant les yeux de l’Ignorant : il entrevoyait un superbe homme nu, non point mouillé d’un peu d’eau sous une main de vieillard, mais baigné dans la forte mer houleuse, à Matavaï de Tahiti. Des pirogues, par centaines, ceinturaient la béante baie, et tenaient l’écart, attentives à ne point troubler les monstrueux et bienveillants requins, dieux autant que les dieux du firmament septième, qui venaient laver le chef, et le sacrer de leurs dures nageoires bleues. L’homme nu, ramené sur la rive, avait volé jusqu’au maraè sans toucher le sol : car, au long du cortège onduleux et sonore, les prêtres, en criant, portaient les dieux ; les chefs portaient le chef, devenu lui-même dieu. Il avait ceint le Maro Rouge : il avait mangé l’Œil : on ne lui parlait plus qu’avec les grands mots réservés.
Ha ! Térii tressaillit et chassa, d’un grand effort, ces inquiétants souvenirs. Il prit peur qu’on ne vît