Page:Segalen - Les Immémoriaux.djvu/250

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Soudain, le faré vibra de rires, de voix amies, d’appels, de petits cris amusés, et s’emplit de la troupe joyeuse des fétii de chaque jour. Ils revenaient du bain avec un grand délassement des membres, de la figure, des yeux, de toute la peau rafraîchie. Les oreilles d’Eréna se paraient de fleurs rouges, ouvertes elles-mêmes comme d’autres oreilles parfumées. Ses cheveux étaient ceints de feuilles menues et odorantes aussi, et sa poitrine respirait à travers la tapa ouverte. Aüté la pressait, toute étreinte, si bien qu’ils se glissèrent à la fois entre les poteaux d’entrée. Rébéka portait les maro mouillés, tordus à la hâte, et qui ruisselaient. Samuéla, fier d’un plein panier d’écrevisses, chantonnait un petit péhé jovial. Ils aperçurent le Missionnaire : sitôt Eréna-aux-Fleurs cacha les grandes corolles et couvrit son sein nu. Le pêcheur assoupit sa chanson. Toute joie tomba.

Noté reconnaissait depuis longtemps Samuéla pour l’un des premiers et des plus certains disciples de Iésu ; et il lui serra la main avec une grande bonté. Cependant, le visage de Rébéka semblait inquiet, et plein de cette confusion nouvelle que les gens nommaient « haáma », d’un mot Piritané, faute de pouvoir la désigner en leur langage. Cela prenait sou-