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Page:Segalen - Les Synesthésies et l’école symboliste.djvu/8

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revêtant les contours d’une carte de France. La Géométrie et les abstractions y abondent elles-mêmes : et pour tel esprit, telle sensation définie revêt l’aspect d’un schème, d’un diagramme toujours identique à lui-même.

Donc, tout est possible, dans le monde des Synesthésies : et jusqu’aux calembours sensoriels les plus imprévus, et jusqu’aux accouplements les plus monstrueux. Or, voici, de ce chaos, les notions générales que l’on peut dégager. Nous nous restreindrons en nos exemples à l’Audition colorée, la plus fouillée, la plus fréquente aussi, des Synesthésies.

Convenons d’appeler « Primaire » la sensation point-de-départ, perçue, objective. Et : « Secondaire », son concomitant, son Écho, la sensation induite.

Leur mécanisme psychologique d’association nous paraît, avec Destouches, afférer aux deux catégories suivantes :

Catégorie A. La sensation secondaire est objectivée, « c’est-à-dire qu’elle possède tous les caractères de vivacité et d’extériorité d’une véritable perception. Elle est projetée et localisée au dehors, comme une hallucination, et se mélange avec les sensations réellement éprouvées au point de ne pouvoir en être séparée[1]. »

En schématisant, nous dirions que la lettre U, par exemple, fait voir vert ; que la tonalité de do majeur fait voir blanc.

Catégorie B. Mais la sensation Écho peut simplement être pensée, n’exister qu’à l’état d’Idéation, et sa relation avec la Primaire est faite d’analogie,

  1. Destouches, op. cit.