Page:Segalen - Peintures, 1918.djvu/40

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Mais, suivez le regard : le regard s’en va droit à cette autre petite flamme rouge qui se tient fière et fixe dans la nuit… Sans lampe et sans huile, sans autre nourriture que puisée dans l’ombre alentour, elle éclaire cependant tout de sa couleur.

C’est donc cela ! L’Empereur désire cette flamme : il sait bien qui elle est ! Il l’invoque, il la conjure, il ne la quitte point des yeux… Et vous aussi, regardez, regardez mieux : (de plus près, de tout près, en retenant bien votre souffle pour ne pas la faire trembler…) Elle grandit, elle change, elle se dresse, se courbe et se contourne… Sa pointe s’effiloche en dix mille cheveux, et deux bras longs aux dix doigts effilés ; son ventre bifurque en deux jambes frémissant à la jointure, et il se fait deux seins aussi, de couleur brûlante, et des lèvres, une langue, des yeux…

Est-ce une flamme encore ? Ah ! vous pouvez respirer à votre aise, maintenant… (si