Page:Segalen - René Leys.djvu/63

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qui habite tout au nord de la Ville tartare, me prie de l’excuser s’il ne vient aujourd’hui qu’une seule fois chez moi, — pour dîner. » — Entendu. Et je me rendors.

… Un peu plus tard : ce mot, écrit au pinceau, mais en belge, sur du papier chinois mince tramé de fleurettes roses et vertes : René Leys me prie de l’excuser s’il ne peut me donner aujourd’hui ma leçon de l’après-midi. Il viendra sans doute après minuit. Et il termine : « On » me demande… où vous savez ».

J’ignore. Pour un garçon jamais sorti de la porte paternelle, il découche un peu trop à ses débuts.

… Le sommeil est impossible. Et ce grand œil jaune du ciel pékinois, ce grand soleil si quotidien qu’on le réclame comme un dû, qu’on l’attend comme un ami fidèle… Je m’accorde donc plein congé, puisque mes professeurs eux-mêmes…

Et ce grand soleil donne encore une ombre allongée, que je suis debout, dehors, à cheval, en route pour n’importe où, sous sa lumière et sous le bol bleu sans tache… — n’importe où, c’est-à-dire évidemment près du Palais.

D’instinct, me voici face à Tong-Houa-men, la Porte de l’Orient Fleuri, — jamais vue encore à cette heure princière… encombrée de chars à mules, de valets, d’eunuques et d’officiers en tenue de cérémonie : le chapeau d’été, le chapeau conique de paille