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Page:Segur - La Fortune de Gaspard.djvu/166

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Gaspard.

Merci bien, monsieur ; les moments que je suis avec monsieur, sont les plus heureux de ma journée ; ils me font du bien au cœur. »

Gaspard disait vrai : M. Féréor était pour lui un moyen d’avancement, le plus commode, le seul pour arriver à la position et à la fortune qu’il voulait gagner à tout prix ; et il était de la plus grande importance pour lui d’obtenir la confiance absolue de M. Féréor. Il pouvait, au moyen de ces conversations toutes confidentielles, empêcher que la faveur et la confiance de son maître ne se reportassent sur tout autre que sur lui-même ; c’était le chemin de la fortune et du pouvoir ; lui seul devait y marcher, tous les autres devaient en être évincés.

Il éprouvait bien quelques remords de se faire ainsi le dénonciateur de ses camarades ; mais il les chassait promptement en se disant : Je veux être riche et puissant ; d’ailleurs je ne dis que la vérité ; je remplis mon devoir près de M. Féréor, tant pis pour eux s’ils ne remplissent pas le leur.

Le jour même de la confidence de Gaspard, M. Féréor rencontra Urbain qui rentrait à l’atelier et qui fumait. Il n’avait pas vu M. Féréor ; quand il l’entendit venir et qu’il leva la tête, il était trop tard ; M. Féréor l’avait aperçu.

« Quelle chance ! pensa M. Féréor. Il fume malgré ma défense ; il va partir de suite, et personne ne