Page:Segur - La Fortune de Gaspard.djvu/42

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sieurs fois par son père, mais il n’avait pas fait semblant d’entendre, pour débarrasser plus vite son frère de sa tâche.

« À présent, dit Lucas en riant, mes oreilles se sont ouvertes, et j’entends mon père qui m’appelle tant qu’il a de la voix… Voilà, voilà ! cria-t-il. J’arrive ; nous avons fini. »

Ils eurent bientôt rejoint les autres près du pommier, et tous deux demandèrent à boire et à manger. Le père s’empressa de donner à Lucas une bonne tranche de pain et un grand verre de cidre. Il servit moins abondamment Gaspard.

Un ouvrier.

Tu n’aimes donc pas à tourner le trèfle, mon garçon ?

Gaspard.

Je n’aime pas ce qui fatigue et ce qui fait chaud.

L’ouvrier.

Ah ! ah ! ah ! tu es délicat, toi ? Et comment veux-tu que les choses marchent si personne ne veut se fatiguer, ni suer, ni travailler ?

Gaspard.

Je veux bien travailler, mais dans des livres et des écritures.

Un autre ouvrier.

Ah ! tu veux devenir un gratte-papier ! Joli amusement ! J’aime mieux devenir rouge comme un radis en travaillant la terre, que pâle comme un navet en piochant dans les livres.