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Page:Segur - La Fortune de Gaspard.djvu/77

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cole un M. Frölichein, qui a une belle manufacture à deux lieues d’ici. Il fait une rude concurrence à M. Féréor ; mais il manque de sujets intelligents, et il voulait t’avoir pour te faire apprendre la mécanique. Ton père a refusé.

— Je le sais bien ; j’en suis désolé, monsieur. Ne pourriez-vous pas en parler à mon père ? À quoi sert de me garder à la ferme, puisque je n’y aide pour ainsi dire pas ? Mon père veut absolument m’empêcher de travailler avec mes livres ; et moi, je veux profiter de vos leçons, monsieur, et savoir ce qu’il faut pour être, comme dit M. l’Allemand, un bon contremaître. Mon père croit que les ouvriers de fabrique sont tous mauvais ; ce n’est pas vrai, cela, car j’en connais de très bons.

Le maître d’école.

Tous, non ; mais il y en a beaucoup, et ton père a raison de ne pas te mettre avec tout ce monde-là à l’âge que tu as.

Gaspard.

L’âge n’y fait rien, quand on veut apprendre.

Le maître d’école.

L’âge y fait beaucoup, et je te répète que ton père a raison. Attends un an ou deux. Quand tu auras seize ou dix-sept ans, nous verrons, je parlerai à ton père ; mais à présent, non.

Gaspard ne fut pas content, mais il n’osa pas répondre au maître d’école, et il retourna tristement à la ferme. Tout le monde était sorti.