Page:Segur - Les Deux Nigauds.djvu/107

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Le Polonais ne bougea pas. Prudence fut indignée.

« Puisque le Polonais manque de courage, j’en aurai, moi, pour défendre mes jeunes maîtres. Arrière, gamins ! »

Les gamins ne reculèrent pas ; mais l’air résolu de la pauvre Prudence prenant la défense des enfants qu’elle conduisait, leur plut, et l’un d’eux s’écria :

« Vive la bonne ! — Vive le Polonais ! ajouta un autre. — Vivent les provinciaux ! Vive la bande ! Vive le bonnet rond ! Honneur au bonnet rond ! hurlèrent-ils tous en chœur. — Un triomphe au bonnet rond ! Un triomphe aux petits ! »

Et dans une seconde, Prudence et les enfants furent entourés par les gamins et escortés, malgré leurs supplications et leur résistance. Le Polonais effaré courait après eux muet de terreur ; Prudence suppliait en vain qu’on la laissât avec ses jeunes maîtres ; les enfants se révoltaient, mais les rires des gamins étouffaient leurs paroles. Le Polonais cherchait des yeux un sergent de ville qui lui portât secours ; aucun ne se trouvait sur leur chemin. Les passants s’éloignaient de ce groupe devenu très considérable ; enfin un soldat, auquel le Polonais exposa la cause de ce tumulte, courut chercher du secours au poste voisin. Quand les gamins virent venir un caporal et trois soldats, ils ne jugèrent