Page:Segur - Les Deux Nigauds.djvu/156

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que Prudence et Coz eussent pu se reconnaître, Mme Bonbeck les avait saisis par le bras et entraînés dans la rue.

« Viens, ma pauvre Prude ; tu es une bonne fille. Tu vas venir avec moi acheter deux robes raisonnables à Simplette, qui est une sotte et une ingrate ; puis un chapeau pour remplacer son extravagant chaperon à plumes, puis une casaque pour compléter sa toilette ; Coz, mon ami, tu vas avoir la complaisance de nous accompagner pour porter nos emplettes. »

Coz salua et suivit, pendant que Prudence, plus embarrassée de la bonté de Mme Bonbeck que de ses colères, l’accompagnait avec tremblement, mais sans résistance.

Simplicie, suffoquée de honte et de colère d’avoir été traitée si brutalement devant témoins, s’empressa de rentrer dans sa chambre, se jeta sur son lit et se mit à sangloter avec violence,

« Suis-je malheureuse, se dit-elle, de m’être mise dans les mains de cette méchante femme ! Papa n’aurait pas dû m’envoyer chez elle ! Si j’avais pu deviner tout ce qui m’arrive depuis mon départ. Je n’aurais pas écouté Innocent et je n’aurais pas demandé à venir à Paris. C’est que je ne m’amuse, pas du tout ! je m’ennuie à périr… Je suis mal logée, l’appartement est si petit qu’on y étouffe, perché au cinquième étage ; je n’ai rien pour m’a-