Page:Segur - Les Deux Nigauds.djvu/308

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bier, et pourquoi vous a-t-elle ainsi battues toutes deux ? »

Prudence raconta à Mme de Roubier la scène qu’elles avaient subie en rentrant de chez elle la veille au soir.

« Pourquoi, c’est ce que je ne puis dire à madame. J’ai bien vu à quelques paroles qui lui échappaient qu’elle aurait voulu venir avec mamzelle chez madame ; mais comme elle n’en avait rien dit avant notre départ, ni mamzelle ni moi nous n’étions pas plus coupables que l’enfant qui vient de naître. Madame juge que mamzelle, qui n’a pas l’habitude d’être battue, a été impressionnée à croire qu’elle allait mourir ; la pauvre enfant a passé la nuit à pleurer et à trembler. Moi-même, qui n’étais pas plus contente qu’elle, je ne trouvais rien pour la consoler, sinon quand je lui ai proposé de nous sauver de grand matin. Ça l’a un peu remontée ; et puis nous avons résolu de demander refuge à madame, ne connaissant personne dans Paris. J’espère bien que voilà mamzelle guérie de son Paris. Ville de malheur, nous n’y avons eu que de l’ennui ! Madame me croira si elle veut, mais je considère le temps que j’y ai passé comme un temps de galères. J’espère bien que monsieur me permettra de lui ramener mamzelle et M. Innocent, qui n’est guère plus heureux dans sa pension. Le voilà bien avancé avec son uniforme qui lui bat les talons ;