Page:Segur - Lettres de la comtesse de Segur.djvu/10

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vous eu encore du frisson (symptôme de fièvre) ? Nous attendons la réponse avec impatience et je vous embrasse avec tendresse.



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À LA VICOMTESSE ÉMILE DE PITRAY


Les Nouettes, mardi 13 mai 1856.


Chère Minette chérie, d’abord je t’embrasse avec mon petit Émile qui me semble être bien plus mon fils, mon cher fils, depuis que je le tutoie. Me voici en pleine possession d’une tranquillité qui n’est troublée que par le regret de la posséder au prix d’une pénible séparation ; pourtant j’avoue que je ne suis ni en larmes ni même attristée puisque je t’aurai, toujours avec mon petit Émile, lundi ou mardi prochain.

Nous avons fait très bonne route ; à quatre heures dix-huit nous étions à Conches ; dis cela à Woldemar[1] ; à cinq heures moins neuf,… je me trompe, à quatre heures cinquante et une, nous partions pour Laigle dans une horrible diligence envahie par vingt et un voyageurs ; il doit y tenir dix ou onze tout au plus. Nous avons donc cheminé lentement ; trois malheureux, mais excellens chevaux ont traîné tout cela pendant neuf lieues et pendant trois heures trois quarts ; ce sont les mêmes victimes

  1. Mon cousin, le comte Filippi, qui tenait par principe à dire très ponctuellement les heures des trains. Ma mère l’avait élevé et le regardait comme un de ses enfants.