Page:Segur - Lettres de la comtesse de Segur.djvu/219

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la gouvernante est un idéal de l’espèce ; le moral aussi charmant que le physique. Adieu, chère bonne petite, que le bon Dieu te bénisse !



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À LA VICOMTESSE ÉMILE DE PITRAY


Kermadio, 11 novembre 1863.


Chère petite, rien de nouveau à te dire de Kermadio ; le temps épouvantable est aujourd’hui (nouvelle lune) plus épouvantable que jamais. Je ne sais même si nous pourrons sortir, ce qui serait fâcheux, car c’est aujourd’hui une pleine mer magnifique de une heure à trois, et ce coup d’œil ne se présente qu’aux nouvelles lunes et aux pleines lunes. J’avance mon Petit Bossu malgré les incursions des deux petits. Henriette a beau défendre qu’on les laisse venir à certaines heures, ils font des invasions continuelles et dérangent le cours de mes idées qui ne naissent que dans le repos. Je voudrais pourtant finir avant mon départ. Il me faut absolument avoir livré mon manuscrit avant le jour de l’an; j’en ai cent pages écrites ; les deux cents autres iront plus vite parce que j’ai enfin trouvé une idée, au lieu d’errer dans une lande peuplée de chardons et de joncs marins. Le résultat de mon séjour à Kermadio est la certitude… que nous pouvons avoir en Normandie, des joncs marins ou ajoncs pour faire haie, et qu’au lieu d’attendre une clôture huit ou dix ans, on peut l’avoir excellente en trois ans. Je ferai donc semer des ajoncs tout le long de mes haies et bois extérieurs,