Chère enfant, c’est aujourd’hui ta fête ; les enfans l’auront sans doute célébrée par des bouquets; vous avez certainement tous (été) à la messe ; tes deux grands enfans auront communié pour toi, comme Gaston et moi nous avons communié ici à la même intention… Puisses-tu avoir pour bouquet la bienheureuse nouvelle de la défaite complète des Prussiens ! …
Nous avons toujours un temps admirable et enrageant par rapport à ces Allemands qui se sèchent et se chauffent à notre beau soleil. Il paraît qu’on en tue des milliers, mais pas encore assez. Voici le pauvre héroïque Strasbourg pris ! Quel sort vont avoir les dix-huit mille prisonniers? Mlle Heyberger[1] est dans la désolation, un accablement de petit enfant ; elle sait ses sœurs en sûreté en Suisse ; elle n’a à Strasbourg que son père et un frère qui sont blottis dans les caves comme le reste des habitans et qui n’ont pas grand’chose à craindre. L’abbé Diringer[2] a peine à dominer sa fureur contre les Prussiens ; il ne veut pas être Prussien, ni que son bien soit Prusse et en Prusse. J’espère que ce ne sera pas, et que le bon Dieu ne permettra pas l’accomplissement de cette grande iniquité protestante…