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LE NOTAIRE JOFRIAU

— Il n’y a pourtant aucun mystère dans tout ceci, ma Josephte. Puisque le marché est conclu et que la vente sera connue publiquement, je puis t’en parler à l’aise. Le domaine de Sérigny va tout simplement passer à Huet. Tu connais la fortune de celui-ci dont il fait grand état et qui lui permet d’acquérir cette propriété. Ce qui a fait si longues les discussions préliminaires, c’est une ambition dont Huet ne veut pas démordre : Il ne veut acheter cette terre seigneuriale que s’il a de ce fait, le droit d’en prendre le titre qu’il convoite depuis longtemps. Ils en sont venus à une entente et Antoine pourra ajouter « de Sérigny » à son nom roturier ; l’acte de vente est prêt à être signé, j’attends mes clients tout à l’heure.

Un grand nombre de seigneurs de ce temps étaient d’anciens militaires venus au Canada comme colons et qui ignoraient tout des travaux de la glèbe. Leurs censitaires et laboureurs, par contre, étaient de vrais agriculteurs qui continuaient ici ce qu’ils faisaient dans leurs provinces françaises. Cela explique que ces derniers faisaient rapidement fortune, tandis que les maîtres, besogneux et découragés, cherchaient les fonctions publiques et vendaient volontiers leurs terres et leurs titres aux fils de ceux qui avaient été leurs dépendants.

Les deux époux continuaient leur conversation.

— Cette propriété avait été apportée en dot par la dame de Sérigny, n’est-ce pas Michel, et c’est le mari qui la vend ?