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l’âme, si faites pour être purement, tendrement, constamment aimées ! ... n’aimez pas. »

LETTRE LXXXI.

5 août, IX.

Vous convenez que la morale doit seule occuper sérieusement l’écrivain qui veut se proposer un objet utile et grand ; mais vous trouvez que de certaines opinions sur la nature des êtres pour lesquelles, dites-vous, j’ai paru pencher jusqu’ici ne s’accordent pas avec la recherche des lois morales et de la base des devoirs.

Je n’aimerais pas à me contredire, et je tâcherai de l’éviter ; mais je ne puis reprocher à ma faiblesse les variations de l’incertitude. J’ai beau examiner, et mettre à cet examen de l’impartialité et même quelque sévérité, je ne puis trouver là de véritables contradictions.

Il pourrait y en avoir entre diverses choses que j’ai dites, si on voulait les regarder comme des affirmations positives, comme les diverses parties d’un même système, d’un même corps de principes donnés pour certains, liés entre eux et déduits les uns des autres. Mais les pensées isolées, les doutes sur des choses impénétrables, peuvent varier sans être contradictoires. J’avoue même qu’il y a telle conjecture sur la marche de la nature que je trouve quelquefois très-probable, et d’autres fois beaucoup moins, selon la manière dont mon imagination s’arrête à la considérer.

Il m’arrive de dire : Tout est nécessaire ; si le monde est inexplicable dans ce principe, dans les autres il semble impossible. Et après avoir vu ainsi, il m’arrivera le lendemain de me dire au contraire : Tant de choses sont conduites selon l’intelligence, qu’il paraît évident que beaucoup d’autres choses sont conduites par elle. Peut-