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Page:Senart - Essai sur la légende du Buddha.djvu/133

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SUR LA LÉGENDE DU BUDDHA

turelle, au point d’embrasser tout l’espace et d’atteindre aux extrêmes limites de l’univers[1].

Le titre de Mahâpurusha pouvait faire pressentir une tradition plus qu’humaine ; on s’est laissé tromper aux allures évhéméristes du conte ; on a traduit littéralement « un grand homme, » sans attacher à cette dénomination une valeur plus définie que nous ne faisons d’ordinaire. Le nom même aurait dû être une pierre de touche ; il n’a été qu’une cause d’erreur nouvelle. La méprise est pourtant incontestable.

Le Mahâbhârata (XII, 12701 et suiv.) nous montre Nârada quittant l’ermitage des ṛishis Nara et Nârâyana pour se rendre au Çvetadvîpa, « l’Île Blanche, » et y jouir de la vue, y recueillir les enseignements de Purusha ou Mahâpurusha, suprême expression de la divinité et de l’âme universelle. À son retour à l’ermitage de Badarî (v.  13334 et suiv.), il aperçoit les deux ṛishis : « par leur éclat ils surpassent la splendeur du soleil qui illumine toute chose ; ils portent en cercle leurs cheveux nattés ; ils ont les doigts des pieds et des mains reliés par une membrane, les pieds marqués du signe de la roue, la poitrine large, les bras longs ; ils ont quatre testicules, soixante dents, huit canines ; leur voix est puissante comme le mugissement du nuage ; beaux, le front haut, les sourcils, les joues, le nez parfaits, la tête semblable à un parasol, — tels étaient ces deux êtres divins, doués des signes, appelés (ou caractérisés comme) Mahâpurushas[2]. » Alors, rendant hommage à ces deux « Puru-

  1. Hardy, Man. of Budh. p. 365 ; etc.
  2. « Evam̃ lakshaṇasampannau mahâpurushasam̃jñitau, » v.  13342. Le Bhâgav. Pur. (X, 3, 23) appelle Kṛishṇa « Mahâpurushalakshaṇa », et malgré la date du livre, le témoignage a sa valeur ; car