Page:Servières - Richard Wagner jugé en France, 1887.djvu/105

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et trouva chez lui un accueil des plus sympathiques. « Monsieur, lui dit Magnan en le quittant, je suis un soldat et non un dilettante, mais votre musique n’a passionné et ému. J’aurai l’honneur de voir L’Empereur ce soir et je vous donne ma parole de lui parler de vous. » La parole fut tenue et, quand, « quelques jours après, Wagner revint au ministère, les domestiques, les employés, le comte Baciocchi, tout le monde était devenu wagnérien[1]. » D’autre part, M. P. Lindau, dans sa correspondance de mars 1861 sur le Tannhœuser, rapporte que la princesse de Metternich, à un bal des Tuileries, réussit à intéresser l’Empereur aux tribulations de son musicien favori et à obtenir pour lui la promesse formelle d’un tour de faveur. Par une étrange destinée, il était réservé à ce révolutionnaire d’être protégé, grâce au caprice d’une grande dame, par l’auteur du coup d’État de 1851, au génie mélodique le plus ardu d’être patronné par un souverain absolument rebelle à la musique !

Le directeur de l’Opéra ayant reçu du ministre l’ordre de mettre immédiatement à l’étude la partition de Tannhœuser, les répétitions commencèrent le 24 septembre 1860. Alphonse Royer avait mission de ne rien refuser à l’auteur. Le musicien ne voulut confier qu’au ténor allemand Niemann, le rôle de Tannhœuser, on engagea Niemann en payant son dédit. Il avait remarqué au Théâtre-Italien le baryton

  1. Richard Wagner, l’homme et le musicien, à propos de Rienzi, Dentu, 1869.