Page:Servières - Richard Wagner jugé en France, 1887.djvu/197

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l’Autriche à Sadowa, avide sans doute de nouvelles conquêtes, l’opuscule de Wagner, symptomatique en ce qu’il révélait, deux ans avant la guerre de 1870, les tendances autonomes de l’Allemagne, aurait dû instruire nos gouvernants des dispositions secrètes de nos bons voisins et amis. On ignora l’œuvre ou l’on en méconnut la portée politique, comme on devait plus tard refuser d’ajouter foi aux menaçantes prédictions du colonel Stoffel, notre attaché militaire à Berlin, si bon juge cependant de la faiblesse de nos armements comparés aux formidables effectifs de guerre de la Prusse.

Il y a dans l’opuscule de Wagner une confusion, un désordre, un manque de divisions nettement observées, qui en rendent la lecture fort pénible. De toutes les récriminations haineuses et violentes de l’auteur, tâchons de dégager les idées générales.

La mission de l’Allemagne consiste, d’après lui, à faire prévaloir une culture intellectuelle plus élevée contre laquelle la civilisation française n’aura plus de pouvoir. Car le génie allemand est détruit, annihilé depuis deux siècles par le rayonnement de la civilisation de la cour de Louis XIV. Cette influence fut même si puissante qu’elle subjugua le souverain le plus essentiellement allemand des temps modernes, Frédéric II. Elle a été d’ailleurs imposée au peuple allemand par ses princes, serviles imitateurs des coutumes françaises. En dépit de cet asservissement à une influence si contraire au génie de la nation, l’art allemand est né sans les princes. Par suite de