Page:Servières - Richard Wagner jugé en France, 1887.djvu/242

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enchevêtrements du tissu musical, l’esprit suit les transformations successives de cet amour, d’abord chaste et contenu, puis s’échauffant par degrés, passant par tous les ravissements de la félicité humaine et s’exaltant peu à peu jusqu’au tumultueux délire de la passion inassouvie pour retomber, énervé de volupté, dans les extases alanguies de la passion satisfaite. »

Dans un des premiers concerts de l’hiver 1876-1877 (29 octobre), M. Pasdeloup, toujours dévoué à la gloire de Wagner, voulut faire connaître à son public au moins un fragment de la Tétralogie. Il avait choisi la marche funèbre de Gœtterdœmmerung, dont tous les spectateurs de Bayreuth avait admiré le style grandiose, la lugubre et héroïque lamentation.

M. Élémir Bourges qui, dans son très beau roman, le Crépuscule des Dieux[1], a, par l’agonie des dieux du Walhall germanique, symbolisé la fin d’une lignée princière, celle des ducs de Blankenbourg, a parlé de cette marche avec une sobre et saisissante éloquence où passe le souffle épique d’une oraison funèbre de Bossuet.

« Au milieu du profond silence, une marche solennelle se déroulait, la marche de la mort des Dieux, car le héros Siegfried venait d’être tué et tous les Dieux mouraient de cette mort. Et le duc écoutait, béant, cette lamentation funèbre qui l’étonnait par une horreur et une majesté surhu-

  1. 1 vol. in-18, Giraud, Paris, 1884.