Page:Servières - Richard Wagner jugé en France, 1887.djvu/308

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merveilleuse, tout cela ne remplace pas un éclair de sincérité, un cri, une larme, une seconde de véritable émotion. Trop de science, et… pas assez d’autre chose. C’est pourquoi des œuvres telles que Tristan et Yseult ne peuvent rencontrer chez nous qu’un succès de convention. »

Si je me suis abstenu jusqu’ici de donner mon appréciation personnelle sur les ouvrages de Wagner, on me permettra du moins, — faute de l’avoir trouvée dans les articles des critiques autorisés, — d’extraire d’une étude publiée par moi dans la Minerve du 25 mars 1885, une analyse Mêle de ce fragment du second acte de Tristan :

« Dans la première scène entre Yseult et Brangœne, je noterai le ravissant dessin des flûtes qui serpente dans l’orchestre avec les méandres onduleux d’un filet d’eau bruissant sous les ramures, le merveilleux appassionato chanté par les cordes lorsqu’Yseult attribue ses égarements amoureux à la puissance de la déesse Minne et la conclusion si expressive de cette scène où se traduit l’agitation de son âme, en l’attente du bien-aimé dont elle halo la venue par des appels désespérés. Il faut citer, parmi les pages les plus remarquables du duo suivant, l’éclatant tutti qui célèbre la passion délirante des deux amants, après les premiers mots échangés, contrepointé au dessin d’orchestre qui a servi à décrire l’attente folle d’Yseult, le cantabile dans lequel Yseult maudit le jour, le délicieux hymne à la nuit où les deux voix s’unissent et se répondent contrai-