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MIROIR, CAUSE DE MALHEUR

Ainsi nous étions en train de nous jurer une foule de choses, lorsque les soldats de Sil-Là entrèrent dans le palais préfectoral et emmenèrent ma femme d’un côté et moi de l’autre. Depuis ce temps, je n’ai pu la revoir. Lorsque la paix fut revenue, je me mis aussitôt à sa recherche. Or, on m’apprit que le généralissime de l’armée ennemie l’avait emmenée dans son pays ! Vous pensez bien que j’ai volé jusqu’à Kiung-Jou, capitale de Sil-Là. Arrivé à Kiung-Jou, j’ai réussi à faire la connaissance d’un domestique de ce généralissime. Je lui demandai discrètement tout ce que je voulais savoir. Le domestique — il était très bavard — me répondit facilement sans savoir à qui il parlait.

— « Écoutez donc, me disait-il, notre généralissime nous a amené de la récente guerre une très belle maîtresse. On dit qu’il l’aurait prise au préfet de Ko-Yang… »

En apprenant ces nouvelles je m’en moquai, car j’étais absolument sûr de la pureté de ma femme. Elle aurait certainement préféré la mort à la honte ! Certes, pensais-je, le généralissime voudrait la faire sa femme, mais il n’y réussira jamais ! D’ailleurs s’il l’y avait forcée, elle ne serait déjà plus dans ce monde ! Ce soir-là, décidé à aller la voir, coûte que coûte, je rôdai autour de la maison ennemie tout en cherchant à y pénétrer. Un grand trou d’égoût au-dessous du mur s’offrit à mes yeux. Je m’y précipitai. Or, à peine avais-je pu entrer dans la cour de la maison du généralissime ennemi que j’entendis quelqu’un dire tout près de moi : « Grand Dieu ! quand voudriez-vous que je revoie mon pays natal et les miens