Page:Sevestre - Cyranette, 1920.djvu/57

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pas pourquoi je finirais vieille fille, — je prendrai quelqu’un comme lui. C’est tout à fait le genre d’homme qu’il me faut. Il entre dans mes idées, quoi ! Il répond à mon rêve.

Elle dit cela très sérieusement, tout badinage à part ; mais Denise en souffre plus que si elle persiflait.

— À propos, reprend-elle, que devient notre commerce, belle épistolière ?… Dire que je ne décachette même plus les lettres qu’il m’envoie !

— Parce que tu le veux bien, répond un peu sèchement Denise.

— D’accord, et je ne te reproche rien, chérie.

— Il ne manquerait plus que ça !

Du coup, Liette se rebiffe :

— Quel ton est-ce là ?… Vrai, Denise, tu es d’une humeur, ce soir.

La pauvre enfant lutte avec elle-même. Sa bonne nature l’emporte et elle embrasse sa sœur :

— Ne fais pas attention, Liette.

Liette se montre magnanime :

— Bon ! Je ne demande pas mieux, moi. Mais qu’as-tu ? Voilà ce que c’est de se claquemurer à la maison. On s’y ennuie, on broie du noir et on devient grincheuse comme une vieille chipie.

Denise est bien près de pleurer.

— Je suis si ennuyée !… Lis, tiens !

Sans trop s’y appesantir, Liette parcourt deux ou trois lettres. Les suivantes retiennent davantage son attention. Elle s’attache même aux dernières, riant parfois, de son rire si gai, parfois très grave et dodelinant dignement de la tête :

— Veux-tu ma façon de penser ?… Il est délicieux, notre filleul ! Mais, se reprend-elle tout à coup, qu’est-ce que je dis, notre filleul ! C’est notre amoureux qu’il faut dire.

— Hélas ! pense Nise.

— Et moi qui, sottement, croyais à une amusette, à un flirt sans conséquence ? Mais, Nise, c’est donc sérieux ?