Page:Sextus Empiricus - Les Hipotiposes pirroniennes.djvu/229

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abſurdité de vouloir prouver une choſe qui eſt en queſtion, par ce qui eſt en queſtion également, ou par elle meſme ; on ne ſauroit donc affirmer meſme avec démonſtration qu’il y ait quelque ſigne. Mais ſi on ne peut rien affirmer, ni en affirmant tout ſimplement, ni avec démonſtration touchant le ſigne, on n’en peut abſolument point parler avec certitude & déciſivement, comme d’une choſe que l’on ait compriſe. Que ſi on ne comprend pas exactement ce que c’eſt que le ſigne, on ne pourra pas dire qu’il ſignifie aucune choſe, puiſque l’on n’eſt pas meſme certain ſur ce qui concerne le ſigne ; & par conſéquent il ne fera point ſigne.

Suivant ce raiſonnement le ſigne ne ſera rien de réel, ni rien que nous puiſſions concevoir. Diſons néanmoins encore ceci. Ou bien les ſignes ſont évidents, ou bien ils ſont obſcurs, ou bien les uns ſont évidents, & les autres obſcurs : mais rien de tout cela n’eſt vrai : donc il n’y a point de ſigne. Tous les ſignes ne ſont pas obſcurs ; en voicy la preuve. Ce qui eſt obſcur n’eſt pas évident par ſoy-meſme, ſelon les dogmatiques, mais il tombe ſous les ſens par quelque autre choſe : donc, ſi le ſigne eſt obſcur, il aura beſoin d’un autre ſigne qui fera auſſi obſcur, (ſuivant la ſuppoſition préſente, qui dit qu’aucun ſigne n’eſt évident ) & celuy ci d’un autre