Page:Shakespeare, apocryphes - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1866, tome 2.djvu/151

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SCÈNE XIX.

direz. Pourtant, permettez : — comment êtes-vous venue dans ces parages ? où avez-vous été élevée ?

marina.

— Le roi, mon père, m’avait laissée à Tharse ; — là le cruel Cléon et sa méchante femme — cherchèrent à me mettre à mort ; ils décidèrent — un misérable à s’en charger ; au moment où celui-ci dégainait, — survint une bande de pirates qui me délivrèrent — et m’emmenèrent à Mitylène… Mais, mon bon seigneur, — que voulez-vous de moi ? Pourquoi pleurez-vous ? Peut-être — que vous me croyez coupable d’imposture ; non, sur ma foi ; — je suis la fille du roi Périclès, — si le bon roi Périclès existe.

périclès.

— Holà ! Hélicanus !

hélicanus.

Mon gracieux seigneur appelle ?

périclès.

— Tu es un grave et noble conseiller, — fort sagace en général : dis-moi, si tu le peux, — ce qu’est ou ce que peut être cette fille — qui m’a fait ainsi pleurer ?

hélicanus.

Je ne sais pas ; mais, — sire, voici le gouverneur de Mitylène — qui en fait un éloge bien exalté !

lysimaque.

Elle n’a jamais voulu dire — quelle est sa famille ; quand on le lui demandait, — elle restait silencieuse et pleurait.

périclès.

— Ô Hélicanus, vénérable seigneur, frappe-moi, — fais-moi une blessure, cause-moi une douleur immédiate ; — de peur que cet océan de joie qui m’inonde — ne déborde les rives de ma mortalité — et ne me noie dans les délices ! Oh ! viens ici, — toi qui rends la vie à qui te l’a donnée, — toi qui es née sur mer, ensevelie à Tharse, — et retrouvée en mer encore !… Ô Hélicanus, — tombe à genoux,