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ÉDOUARD III.

ment peut être aisément violé, — mais qu’un serment violé n’est pas aussi aisément pardonné. — Je lui dirai qu’il y a une véritable charité à aimer, — mais qu’il n’y a pas de véritable amour à être ainsi charitable. — Je lui dirai que la majesté du roi peut endosser cette honte, — mais que tout son royaume ne rachèterait pas une telle faute. — Je lui dirai que mon devoir m’oblige à la convaincre, — mais que son honneur l’oblige à ne pas consentir.

Entre la Comtesse.

— La voici ! Jamais père fut-il — chargé, auprès de son enfant, d’une si triste mission ?

la comtesse.

— Mon seigneur et père, je vous cherchais. — Ma mère et toute la cour vous supplient — de rester auprès de sa majesté — et de faire de votre mieux pour l’égayer.

WARWICK, à part.

— Comment commencerai-je ce message sacrilége ? — Je ne puis l’appeler mon enfant : car où est le père — qui voudrait séduire son enfant en de telles instances ? — Eh bien, femme de Salisbury !… Débuterai-je ainsi ? — Non, Salisbury est mon ami, et quel est l’ami — qui voudrait faire à l’amitié un tel outrage ? — Non ! ni ma fille, ni la femme de mon cher ami !…

À la comtesse.

— Je ne suis pas Warwick, comme tu le crois, — mais un agent de la cour de l’enfer ; — et j’ai incarné mon esprit sous sa forme, — pour te transmettre un message du roi. — Le puissant roi d’Angleterre est épris de toi. — Celui qui a le pouvoir de t’ôter la vie — a le pouvoir de t’enlever l’honneur. Consens donc — à compromettre ton honneur plutôt que ta vie. — L’honneur est souvent perdu, et regagné ; — mais la vie, une fois partie, ne se rattrape