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INTRODUCTION.

autre vie, la piété filiale, l’amour conjugal, l’amour de la patrie, la religion du devoir. Ce drame est la douce et pathétique épopée de l’âme chevaleresque. Dans Richard III, nous avons vu l’age de bronze de la féodalité. Édouard III nous en montre l’age d’or.

III

La lamentable et véridique tragédie de M. Arden de Feversham, dans le Kent, qui fut fort méchamment assassiné par le moyen de sa déloyale et impudique femme qui, pour l’amour qu’elle portait à un Mosby, soudoya deux ruffians désespérés, Blakwill et Shakebag, pour le tuer. — Londres : imprimé pour Édouard White, demeurant à la petite porte nord de l’église Saint-Paul, à l’enseigne du Canon. 1592.

À qui attribuer ce drame étrange qui nous rebute et nous fascine, qui nous révolte par l’horreur même du sujet, mais qui nous captive par la précision et la vérité du détail, qui fait violence à toutes nos délicatesses, mais qui force notre attention et, de péripétie en péripétie, la traîne haletante jusqu’à la catastrophe finale ? Pour bien apprécier cette composition, ne la comparez pas aux chefs-d’œuvre qui l’ont suivie, mais rapprochez-la des opuscules qui l’ont précédée. Songez qu’hier encore les enfants de chœur de la chapelle Saint-Paul jouaient le Gorboduc de lord Buckurst ou je ne sais quelle informe traduction de quelque tragédie de Sénèque. Songez qu’aujourd’hui, dans les provinces, les troupes ambulantes représentent encore avec succès les Mystères de Coventry. Le faux règne et gouverne. L’allégorie barbare accapare la scène et l’encombre de ses fictions parasites. C’est à ce moment critique, de 1580 à 1591, qu’apparaît Arden de Feversham. Faites contre ce drame