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SCÈNE XX.

locrine.

— Qu’elle s’y fasse aussi des vêtements de deuil, — et qu’elle y pleure toujours sur son propre veuvage. — Jamais elle ne franchira le seuil de notre palais, — pour contrarier le brave Locrine en ses amours… — Va à Deucolitum, page, descends le cours de la Lee, — jusqu’au caveau où demeure l’aimable Estrilde ; — et amène-la vite à la cour, ainsi que Sabren ; — elle sera reine à la place de Guendeline. — Que d’autres déplorent la mort de Corinéius. — Je n’entends pas macérer mon cœur — pour celui qui s’est opposé a mon amour.

thrasimachus.

— Locrine a-t-il abandonné sa Guendeline ? — La mort de Corinéius est-elle si tôt oubliée ? — S’il y a des dieux au ciel, comme assurément il y en a, — s’il y a des démons dans l’enfer, comme il y en a nécessairement, — ils châtieront cet outrage notoire, — et répandront leurs fléaux sur ta tête maudite.

locrine.

— Eh quoi ! manant, tu pérores devant ton souverain ! — Es-tu frappé de démence ? — Ne trembles-tu pas sous notre royal regard ? — Ne frémis-tu pas au moindre sourcillement du puissant Locrine ? — Imberbe jouvenceau, si Locrine ne dédaignait pas — de se troubler l’esprit pour un pauvre enfant comme toi, — avec la pointe aiguë de ma hache d’armes — j’enverrais ton âme au Puryphlégéton !

thrasimachus.

— Quelque tendre que soit ma jeunesse, — je saurai tenir tête à Locrine quand il osera s’en prendre à moi. — Mon noble père, de son épée victorieuse, — tua les deux rois géants d’Aquitaine. — Thrasimachus n’est pas dégénéré — au point de trembler et de frémir sous le regard, — sous la parole impertinente d’un écuyer de Vénus.