SEYTON. Sire, les premiers rapports se confirment.
MACBETH. Je combattrai jusqu’à ce qu’il ne me reste plus sur les os un seul lambeau de chair. — Donne-moi mon armure.
SEYTON. Il n’est pas temps encore.
MACBETH. Je m’en veux revêtir. Qu’on envoie en éclaii-eurs de nouveaux cavaliers : qu’on fasse battre tout le pays d’alentour. Qu’on pende ceux qui parlent de peur. — Donne-moi mon armure. — Docteur, comment va votre malade ?
LE MÉDECIN. Son corps est moins malade que son esprit, obsédée qu’elle est d’imaginations qui la troublent et l’empêchent de reposer.
MACBETH. Guéris-la de ce mal. N ’as-tu pas des remèdes qui puissent soulager les souffrances de l’âme, arracher de la mémoire un chagrin enraciné, effacer du cerveau l’empreinte des douleurs qui l’assiègent, et, avez l’aide bienfaisant d’un élixir d’oubli, d’ébarrasser le cœur du poids dangereux qui l’oppresse ?
LE MÉDECIN. En pareil cas, c’est au malade à se guérir lui-même.
MACBETH. La médecine aux chiens ; je n’en veux point. — (À Seyton.) Attache-moi mon arnmre ; donne-moi ma lance. Seyton, mets des éclaireurs en campagne. — (Au Médecin.) Docteur, les thanes m’abandonnent. — (A Seyton.) Allons, dépêche. — (Au Médecin.) Docteur, si lu peux, à l’inspection des symptômes, découvrir la maladie qui afflige mon royaume et le rendre à sa santé première, je ferai répéter tes louanges à tous les échos. (A Seyton.) Ôte-moi cette armure, te dis-je. — (Au Médecin.) Quelle rhubarbe, quel séné, quel purgatif pourra nous débarrasser de ces Anglais ? As-tu entendu parler d’eux ?
LE MÉDECIN. Oui, sire. Les préparatifs de votre majesté nous ont appris leur approche.
MACBETH, à Seyton. Tu m’apporteras tout à l’heure mon armure. — Je ne crains ni les revers ni la mort tant que la forêt de Birnam ne sera pas venue à Dunsiuane. Il sort.
LE MÉDECIN. Si j’étais une bonne fois hors de Dunsinane, l’appât du gain ne m’y ramènerait pas.