Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Guizot, Didier, 1862, tome 3.djvu/140

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par excellence.--Je ne fais pas
maintenant l’imbécile ; je ne laisse pas mon imagination se jouer de moi :
car toutes sortes de raisons concourent à me prouver que ma maîtresse
est amoureuse de moi : elle louait dernièrement mes bas jaunes ; elle a
vanté ma jambe et sa jarretière ; et dans cette lettre elle se découvre
elle-même à mon amour ; c’est avec une espèce d’injonction, qu’elle
m’invite à porter les parures qu’elle préfère. Je rends grâces à mon
étoile ; je suis heureux. Je me singulariserai, je me pavanerai, en bas
jaunes, et en riches jarretières, et tout cela le temps de les
mettre. Louange à Jupiter et à mon étoile ! --Ah ! voici encore un
post-scriptum.-- « Il est impossible que tu ne devines pas qui je suis.
Si tu agrées mon amour, fais-le voir dans ton sourire : ton sourire te
sied à merveille : souris donc toujours en ma présence, mon doux ami, je
t’en conjure. » O Jupiter, je te remercie.--Je sourirai : je ferai tout
ce que tu voudras que je fasse.

(Il sort.)

FABIAN.--Je ne donnerais pas ma part de cette scène divertissante pour
une pension de mille roupies que me payerait le sophi[50].

[Note 50 : Allusion à sir Robert Shirley, ambassadeur près du sophi.]

SIR TOBIE.--J’épouserais cette fille pour cette seule invention.

SIR ANDRÉ.--Et moi aussi.

SIR TOBIE.--Et sans lui demander d’autre dot qu’une seconde plaisanterie
pareille.

SIR ANDRÉ.--J’en dis autant.

(Entre Marie.)

FABIAN.--Voilà venir celle qui attrape si bien les dupes.

SIR TOBIE à Marie.--Veux-tu mettre ton pied sur ma tête ?

SIR ANDRÉ.--Ou sur la mienne ?

SIR TOBIE.--Jouerai-je avec toi ma liberté, aux dames ? Et deviendrai-je
ton esclave ?

SIR ANDRÉ.--Oui, d’honneur ; ou veux-tu que ce soit moi ?

SIR TOBIE.--Tu l’as plongé dans un tel rêve, que quand il en perdra
l’image, il en devi