Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Guizot, Didier, 1862, tome 5.djvu/54

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en tampons, et ma nudité exposée aux regards affrontera les vents et la rage des cieux. J’ai pour exemple à me donner crédit dans la campagne ces mendiants de Bedlam qui, avec des hurlements, enfoncent dans les ulcères de leurs bras nus engourdis et morts des épingles, des morceaux de bois pointus, des clous et des brins de romarin, et par ce hideux spectacle soutenu quelquefois par des blasphèmes forcenés, quelquefois par des prières, extorquent les aumônes des petites fermes, des pauvres misérables villages, des bergeries, des moulins : « le pauvre Turlupin, le pauvre Tom ! » Encore est-ce quelque chose : en restant Edgar, je ne suis plus rien. Il sort.



Scène IV

Devant le château de Glocester. Kent dans les ceps. Entrent Lear, le fou, un gentilhomme.

Lear. – Il est bien étrange qu’ils soient partis de chez eux sans me renvoyer mon messager.

Le gentilhomme. – D’après ce que j’ai appris, la veille au soir, ils n’avaient aucun projet de s’éloigner.

Kent. – Salut à mon noble maître.

Lear. – Comment ! te fais-tu un divertissement de la honte où je te vois ?

Kent. – Non, mon seigneur.

Le fou. – Ah ! ah ! vois donc : il a là de vilaines jarretières ! On attache les chevaux par la tête, les chiens